Menaces sur les géoglyphes péruviens
Un périodique péruvien en ligne, rpp noticias, annonce qu'une douzaine des géoglyphes pré-incas de la culture Paracas (750-300 BC environ) sont menacés par l'extension illégale d'une carrière. Cela fait deux ans que Mario Amano, directeur de Muséo Amano de Lima, dénonce le grignotage des collines du désert de Paracas (280 km au sud de Lima) où se trouvent ces figures gigantesques, à cause de l'exploitation du salpêtre et du manganèse. L'extension des carrières gagne du terrain, et elles sont maintenant à moins d'un kilomètre des pétroglyphes.
Ces représentations, dont la plus célèbre est sans doute le "candélabre", sont tellement grandes qu'on peut les voir sur les images satellitaires mises en lignes par Google Earth :
L'un des sujets le plus souvent représentés est le lama et, par exemple, cette colline en est couverte:
Daniel Levine, chargé du département Amérique au Musée de l'Homme, résume ainsi ce que savent les archéologues de la culture Paracas:
"Sur la côte sud, dans la région de Paracas, au VIIIe siècle avant notre ère, des hommes ensevelissent leurs morts dans des fardos funéraires regroupés en nécropoles. Les corps, assis en position foetale dans une corbeille, sont soigneusement entourés de plusieurs enveloppes textiles. les plus beaux tissus sont des grandes pièces brodées d'une étonnante polychromie. La culture Paracas a été divisée en deux phases selon la forme des tombes : la plus ancienne dite "Cavernas", les fardos ayant été déposés dans des grottes souterraines auxquelles on accède par un puits et, la suivante dite "Necropolis", les fardos ayant été ensevelis collectivement dans des petites maisons souterraines regroupées en nécropoles. La phase Paracas Cavernas reçoit l'influence de Chavin de Huantar comme le révèlent certains décors céramiques, ornées de motifs polychromes réalisés après cuisson avec des pâtes résineuses et soulignés par des incisions."
Selon la mythologie locale, au début des temps, un lama s'approcha de la mer pour en boire l'eau, et cela permit d'éviter des inondations qui, sinon, auraient anéanti le monde.
Bien sûr, on ne sera pas surpris d'apprendre que toute la zone est riche en vestiges archéologiques. La culture de Paracas étant insuffisamment connue, il importe de préserver toute cette région, qui est proche d'une zone d'habitat et se trouve environnée de routes goudronnées. Or une surprise attend le visiteur souhaitant survoler virtuellement les collines de cet endroit, pour voir quels géoglyphes y sont visibles sur les photos satellitaires. En effet, l'un des plus visibles est celui-ci :
Qu'est-ce à dire, sinon qu'un responsable de la communication, comprenant que pas mal de gens utiliseraient Google Earth pour chercher de nouveaux géoglyphes et qu'ils verraient donc cette publicité, l'a fait réaliser en alignant quelque 70.000 bouteilles vides de cette boisson dont, personnellement j'ai horreur (mais à chacun selon ses goûts). On peut quand même s'étonner qu'un tel "coup" ait été monté sans encombre. Imaginons qu'une société veuille utiliser de la sorte, à des fins strictement publicitaires, la renommée d'autres sites archéologiques connus mondialement et visibles du ciel, par exemple les pyramides d'Égypte ou les ruines du Machu Pichu… nul doute que cela lui serait refusé fermement.
Alors, pourquoi un tel massacre a-t-il été possible au milieu des géoglyphes péruviens? Je n'en sais trop rien mais le risque, c'est que, comme beaucoup de gens trouvent ça rigolo, d'autres vont se mettre à faire des choses similaires un peu partout.
Et d'ailleurs, c'est déjà commencé, comme le montrent les images ci-dessous, présentant un mélange de géoglyphes antiques réels et de "crop circles" ou d'autres bricolages récents.
JLLQ