Les crânes de cristal

Le "crâne de cristal" autrefois légué par Alphonse Pinart au Musée de l'Homme jouit d'un regain de célébrité grâce à la sortie du film "Indiana Jones et le crâne de cristal"...

A l'occasion de la sortie du nouveau film présentant les aventures d'Indiana Jones, le musée du Quai Branly présente un crâne de cristal qui se trouvait précédemment dans les collections du Musée de l'Homme.



Il avait été offert au Musée d'ethnographie du Trocadéro, en 1878, par Alphonse Pinart, anthropologue qui eut son heure de gloire et qui est surtout connu pour sa collection de masques kodiak léguée au Musée de Boulogne-sur-Mer, sa ville natale. Ce chercheur autodicacte avait également donné, au Musée qui allait devenir le Musée de l'Homme, plusieurs milliers d'objets amérindiens et océaniens... dont le fameux crâne. Supposé représenter Mictlantecuhtli ou Mictlancihjatl, divinités aztèques du monde des morts, cet objet étonnant est l'un des douze du même type actuellement connus dans le monde et qui font l'objet d'une légende souvent répétée: apportés par les "anciens" de l'Atlantide, ils seraient dotés de nombreux pouvoirs (ondes bénéfiques, etc.) et pour empêcher le basculement de la terre au dernier jour du calendrier maya, soit le 21 décembre 2021, il faudrait tous les réunir, plus un treizième qui serait perdu, et les aligner soigneusement. Leurs prétendus pouvoirs ont donné naissance à un commerce juteux que j'ai déjà évoqué ailleurs sur ce blog (voir ici).
Plusieurs expertises ont prouvé que ces objets avaient été réalisés en réalité au XIXe siècle dans le sud de l'Allemagne, en utilisant des cristaux de quartz importés du Brésil. En effet, les stigmates qu'ils présentent se rapportent à l'emploi de fraises et d'autres outils de joaillerie qui étaient inconnus des anciens Mésoaméricains, dont ils ne respectent pas les canons artistiques.
Emmanuel de Roux, qui ne rate jamais une occasion de dire du mal du Musée de l'Homme, a publié dans le journal
Le Monde un article qui joue sur une opposition simpliste: le crâne exposé au quai Branly aurait fait "l'orgueil du Musée de l'Homme" (sous-entendu: "quelle incompétence!"), mais la vérité serait enfin connue grâce au nouveau Musée Parisien qui en a "hérité", et dont Emmanuel de Roux s'est entiché depuis le début. C'est oublier un peu vite que les réserves (et parfois les expositions) de presque tous les musées du monde comprennent de nombreux faux, et que ces faux peuvent être tout aussi intéressants que des objets authentiques, mais pour d'autres raisons (en nous renseignant notamment sur les goûts des collectionneurs). Et si l'on fait une recherche avec le mot-clef "faux", sur le catalogue en ligne du quai Branly, on trouve 1469 occurrence... voilà qui pourrait faire pas mal d'expositions en perspective.

JLLQ

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