Pillage au musée du Caire ?

Les médias se sont fait l’écho d’un « pillage » au musée du Caire...
Les médias on annoncé que des « pillards » ont saccagé le musée archéologique du Caire Vendredi 28 janvier. Zahi Hawass, président du « conseil suprême » des Antiquités égyptiennes a déclaré que deux momies avaient été dérobées -- puis récupérées -- par une dizaine d’individus qui auraient été interpelés. Sur son blog Zahi Hawass raconte que les « criminels » seraient passés par les verrières du toit pour descendre dans les salles à l’aide de cordes. Selon lui, les coupables auraient cherché des objets en or et, n’en trouvant pas, auraient brisé treize vitrines et, de dépit, en auraient jeté le contenu au sol. Puis ils se seraient rendus dans les galeries du trésor de Toutankhamon, où ils n’ouvrirent qu’une seule vitrine, se saisirent d’une des statues du pharaon dressé sur une panthère, la brisèrent et la jetèrent au sol. Toujours selon Zahi Hawass, les antiquités ainsi atteintes peuvent être restaurées, et la police aurait arrêté tous les criminels responsables. Il ajoute aussi qu’à l’est de Qantara au Sinai, un groupe armé serait entré dans une réserve de musée et se serait emparé des objets de fouilles qu’il renfermait.

Le journal libanais
L’Orient le Jour a publié une photo montrant des jeunes Egyptiens formant une chaîne humaine autour du musée pour en protéger les trésors:


Il est bien difficile d’en savoir plus, mais plusieurs agences de presse arabes ont suggéré que les actes des vandalisme et de pillage signalés dans la ville seraient effectués par des policiers en civil, dans l’intention d’affaiblir la rébellion.
L’ancienne directrice du Musée,
Wafaa el-Saddik a déclaré au journal allemand ZeitOnLIne que le « pillage » aurait été effectué par des gardiens du Musée, et par des policiers qui auraient pris soin d’enlever leur uniforme, avant que d’autres personnes n’en profitent pour pénétrer dans le musée par une verrière.


Militaires devant l’une des vitrines brisées, le 31 janvier


Sur son blog, l
’égyptologue Margaret Maitland a identifié plusieurs des objets abîmés ou dérobés au Caire. En effet, la vidéo diffusée par diveres télévisions montre des détails intéressants, par exemple celui-ci:



... qui permet d’identifier au moins l’une des momies saccagées: c’est celle de Tjuya, mère de la reine Tiye, la grand-mère de Toutankhamon :


Nicholas Reefes & Richard Wilkinson, The Complete Valley of Kings, Tombs and Treasures of Egypt Greatest Pharaohs, Londres, Thames & Hudson, 2008, p. 176.


La momie de son époux Yuya est sans doute l’autre que cite Zahi Hawass. Son visage rappellera quelque chose aux cinéphiles, puisqu’en 1932 il a servi de modèle au film de Karl Freund « La Momie », avec Boris Karloff.





La vitrine visible sur la saisie d’écran ci-dessous contient une maquette de bateau provenant de la tombe de Meseti à Asyout, l’une des plus grandes connues, et datées des environs de 2000 ans avant l’ère commune.



Une photo postée sur Flickr montre à quoi ressemblait cette maquette:



Et cette saisie d’écran montre son état actuel:



Quant à ce support:


C’est vraisemblablement celui de cette statuette en bois doré trouvée dans la tombe de Toutankhamon et montrant le Pharaon monté dans une barque de papyrus et s’apprêtant à lancer son harpon -- dont beaucoup de copies sont en vente sur internet :





Cet autre support appartient également à une autre statue de Toutankhamon:


Ces dégradations ont fait l’objet de nombreux commentaires, dont certains sont visibles la suite de
l’entrevue avec Wafaa el-Saddik et sur le blog de Margaret Maitland (ou l’on peut se reporter pour l’identification d’autres dommages).
Il est peu probable que ces actes aient été ceux de « connaisseurs » qui auraient cherché à tirer un profit matériel de la situation, parce que ces objets très célèbres sont invendables, et que plusieurs d’entre eux ont simplement été détruits ou saccagés sans qu’on cherche à les emporter (à moins que les pillards n’aient été surpris en action?).
Certains disent que tout cela montre qu’il ne faudrait surtout pas restituer à l’Egypte les vestiges conservés dans les musées européens, d’autres évoquent la possibilité de manipulations de l’opinion de la part d’un gouvernement aux abois, d’autres encore évoquent le salaire de misère des policiers et gardiens de musée en Egypte (environ 35 euros par mois), d’autres enfin se scandalisent qu’on ait pu porter le moindre intérêt à ces débris alors que des manifestants se faisaient tuer dans la rue.
Certes. Mais ne s’agirait-il pas d’un nouvel exemple d’instrumentalisation de l’archéologie à des fins politiques?


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Mises à jour:
J’apprends à l’instant (31 janvier, 15H24) que
Zahi Hawass vient d’être nommé « Secrétaire d’Etat aux Antiquités », un poste spécialement créé pour lui... no comment !

Une
dépêche de l’Associated Press signale que l’armée aurait arrêté une cinquantaine de personnes ayant tenté de piller le musée. Des tireurs d’élite ont été placés sur le toit du bâtiment, et un important dispositif armé a été organisé tout autour.
A peine nommé par Hosni Moubarak, le nouveau secrétaire d’Etat Zahi Hawass, a déclaré:

« If the museum is safe, Egypt is safe. »
( « Si le Musée est en sécurité, alors l’Egypte est en sécurité » )


C’est pas de l’instrumentalisation, ça ?

JLLQ









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