Le Buffle antique est toujours présent à Méniet (Ahaggar) vers 5000 BP
Dès lors, l'idée d'une "période bubaline archaïque" attestée par les images rupestres et supposée remonter à la fin du Pléistocène est dénuée de sens.



L'art rupestre est très difficile à dater au Sahara, car il n'existe encore aucune technique fiable de datation des gravures, malgré des essais méritoires tentés en Egypte (Huyghe et al. 2001), et les datations de peintures ne sont possibles que si les pigments minéraux ont été traités à l'aide d'un liant organique suffisamment conservé. Une seule peinture, de l'Akukas, a été ainsi datée de 6175 ± 70 BP (Sinibaldi et al. 1996). Il en résulte que la plupart des chronologies de cet art s'appuient essentiellement sur des arguments stylistiques, et sur des sortes de "fossiles directeurs" sélectionnés au sein des représentations. Cette méthode, relevant d'un paradigme géologique remontant au début des recherches (alors souvent pratiquées par des personnes ayant une formation de géologue) a conduit Théodore Monod (1932) à élaborer une classification générale en quatre étages:
1. « Groupe préhistorique bubalin » ;
2. «
Groupe ancien » ou « préhistorique bovin » ;
3. «
Groupe moyen » ou « libyco-berbère » ;

4. « Groupe récent » ou « arabo-berbère ».

Cette classification a été souvent amendée par la suite, pour arriver à une série de quatre périodes ("Bubalin" ou "Bubalin naturaliste", "Bovidien", "Caballin" puis "Camelin"), qui n'a pratiquement jamais été remise en cause jusqu'à ces dix dernières années, et qui a toujours ses défenseurs. Sans entrer dans les détails, on rappellera ici que l'appellation "Bubalin" s'appuie sur la présence, parmi les images rupestres, de figurations d'une espèce disparue, le grand Buffle antique (Syncerus caffer antiquus, = Pelorovis antiquus), supposé caractériser un étage archaïque de l'art, que certains auteurs veulent faire remonter jusqu'en plein Pléistocène (avant 10.000 BP). Mais cette caractérisation, compréhensible en son temps, n'est plus acceptable depuis que l'on sait que ledit grand Buffle antique a vécu très tardivement, et au moins jusqu'en pleine époque bovidienne, par exemple vers 5.000 BP à Méniet en Ahaggar (Hugot 1963), et même après 4.000 BP à Chami en Mauritanie (Bouchud 1981). Cet animal s'étant éteint très tardivement, on ne peut donc pas exciper de sa présence pour définir une période "archaïque", et il faut abandonner la notion d'une prétendue période "bubaline". On ne peut pas non plus "sauver" cette notion en la modifiant sous la forme, par exemple, d'une période durant laquelle auraient été exclusivement représentés des représentants de la grande faune sauvage africaine, puisque ces bêtes ont parfois survécu beaucoup plus longtemps qu'on ne le pensait naguère: des restes d'hippopotames abondent par exemple dans les restes de cuisine du Ténéréen, vers 3500-2000 BP (Hugot 1974: 195), date qui représente probablement l'ultime période de survie régionale de cet animal.

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